C'est le jour où la passion m'a fait défaut que j'ai trouvé ma voie
- potterywithsoul
- 21 juil.
- 4 min de lecture
Janvier 2025. Je n'ai plus d'emploi salarié. Pour la première fois depuis des années, j'ai DU TEMPS. Du vrai temps libre, sans cette course perpétuelle entre le bureau et l'atelier. J'aurais dû être aux anges.
Enfin l'opportunité de me consacrer pleinement à ma céramique, d'agrandir mon activité, de créer sans contrainte !
Sauf que je n'en avais plus envie.

L'absence révélatrice
Quand je suis partie deux mois en janvier et février en Bretagne, j'étais certaine que la terre allait me manquer. Même pas le début d'une démangeaison au bout des doigts ! plutôt l'envie de faire autre chose avec mes doigts : j'ai appris le crochet, j'ai repris la broderie. Mais pas de manque.
En rentrant à Bruxelles, je me suis rendu compte que je n'avais plus envie d'aller à l'atelier tous les jours.
Moi qui rêvais de pouvoir y passer mes journées entières avant mon licenciement, je me retrouvais à repousser le moment d'y aller.
À trouver mille excuses pour faire autre chose. Je n'avais plus envie d'ouvrir davantage ma boutique.
Alors que c'était pourtant l'évidence logique : plus de temps = plus de production = plus de ventes. Mais cette perspective me pesait au lieu de m'enthousiasmer. Je n'avais plus envie de créer pour vendre en ligne.
Cette mécanique que j'avais mise en place - créer, photographier, poster, vendre - me semblait soudain artificielle et vide de sens. Je n'avais même plus envie de faire de la communication sur Instagram. Moi qui avais bâti cette communauté de 27k personnes autour de ma passion, je me retrouvais devant mon téléphone sans rien à dire. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles j'ai un moment arrêté de communiquer.
La révélation douloureuse
J'ai compris que ma passion était devenue une routine, une forme de pression. Une autre forme de performance à atteindre. Un "il faut que" déguisé en "j'ai envie de".
Pendant des années, j'avais utilisé la céramique comme une béquille pour supporter mon travail salarié. Mais en transformant ma passion en solution, j'avais aussi transformé ma liberté créative en obligation de résultat. La passion se transforme en prison quand la logique économique s'immisce. Quand votre passion doit rapporter, elle change de nature. Chaque heure à l'atelier devient un investissement à rentabiliser. Chaque pièce ratée devient une perte. Le plaisir gratuit disparaît.
Et puis il y a la pression sociale des autres qui vous disent : "Tu as tellement de talent, tu devrais en faire ton métier à part entière !" Cette phrase bien intentionnée qui transforme progressivement le plaisir en devoir. Et surtout quand vous sentez au fond de vous que ce serait effectivement 'logique' mais est-ce que ce serait la bonne décision ?
Étrangement, c'est quand votre passion devient économiquement viable que votre entourage la trouve intéressante et commence à la valoriser.
Mais quand tout le monde attend que vous réussissiez dans votre passion, elle n'est plus tout à fait vôtre.
Alors créer sur commande, même sa propre commande, devient différent que créer par élan. L'inspiration ne se programme pas, mais quand votre activité en dépend, vous essayez quand même et vous vous épuisez émotionnellement. J'appelle ça l"épuisement de l'inspiration forcée.
L'acceptation libératrice
Admettre que ma passion était devenue routine a été douloureux. J'avais l'impression de trahir cette part de moi qui m'avait sauvée pendant des années. J'avais l'impression de détruire ce que j'avais mis des années à construire.
C'était aussi libérateur. Parce que reconnaître qu'une passion peut s'essouffler, c'est aussi reconnaître qu'elle peut renaître. Différemment. À son rythme.

J'ai pensé vraiment remettre les clés de mon atelier, mais quelque chose me retenait. En y réfléchissant, c'est l'endroit que je ne voulais pas perdre. L'endroit dans lequel je me sens toujours bien, mais au sein duquel je me sens à l'étroit en ne faisant que de la céramique. J'ai commencé à réfléchir à ce que cet endroit représentait et j'y ai vu du lien. Là où j'accueille mes clients, là où je donne quelques ateliers. Là où on me dit qu'on se sent bien, comme dans une bulle.
Cette pause a été nécessaire pour retrouver l'essence de ce qui m'anime vraiment : le partage.
Partager mes pièces n'est plus suffisant. J'ai envie et besoin de partager plus. D'autres activités, avec d'autres personnes ; mixer et rencontrer. Organiser et échanger. Revenir finalement à ce que je voulais faire quand j'ai commencé dans mon premier atelier et qui n'avait pas pu avoir lieu.
Finalement, j'arrive, six ans plus tard, là où, instinctivement, je savais où je voulais aller, à la sortie de mon burnout. Mais je n'étais pas prête. Pas suffisamment armée. Pas suffisamment reposée. Maintenant, je construis petit à petit, cette vision que j'ai eue.

Et vous ?
Cette semaine, je vous pose une question délicate :
Votre passion s'est-elle déjà transformée en corvée ? Quelle activité qui vous nourrissait autrefois vous pèse aujourd'hui ? Quel plaisir avez-vous transformé en pression sans vous en rendre compte ?
Il n'y a pas de honte à l'admettre. C'est même le premier pas vers la libération. Racontez-moi. Vos histoires m'aident aussi à comprendre les miennes.
PS : La semaine prochaine, je vous parlerai de ces croyances limitantes qui nous paralysent à 50 ans. Parce qu'avant de reconstruire, il faut parfois déconstruire nos propres certitudes
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